Scolarisation

L’orientation scolaire peut intervenir à différents moments de la vie de la personne présentant un retard mental d’origine génétique, selon l’importance du déficit intellectuel et des pathologies associées.

L’évaluation complète, transdisciplinaire et constamment réajustée des caractéristiques cognitives, comportementales, physiques de l’enfant, associée à l’appréciation de son environnement, est l’étape préalable indispensable à la décision d’orientation. L’évaluation intellectuelle fait partie intégrante de cette évaluation et est sollicitée lors de la constitution du dossier d’orientation scolaire. Pour qu’elle reflète au plus près les capacités de l’enfant et pour que l’affectation dans la classe ou l’établissement le mieux adapté puisse avoir lieu à la rentrée de septembre suivante, il est important qu’elle soit réalisée durant la période qui s’étend de novembre à février. Lorsqu’elle a lieu à l’Institut, afin de réaliser cette évaluation dans les délais et éventuellement rencontrer le médecin référent, il est conseillé de prendre rendez-vous dès le mois d’octobre précédent.

Chaque rentrée scolaire apporte son lot de questionnements et d’inquiétudes, pour les parents… mais aussi pour les enfants, même si certains ne le verbalisent pas toujours. L’équipe de l’Institut est souvent sollicitée sur ce sujet. Voici quelques éléments de réponses aux principales questions que vous nous posez.

Institut médico-éducatif ou école ordinaire ?

Dans l’absolu, il n’y a pas de réponse universelle et définitive. Certains enfants s’épanouissent et développent leurs compétences en milieu ordinaire, avec ou sans adaptation (accompagnement de type « AVS », horaires aménagés…). D’autres profiteront davantage d’une intégration en institut médico-social (IME). Mais s’il y a des écoles « accueillantes », des enseignants formés, il y a aussi des écoles qui « excluent ». De l’autre côté, si les IME ont bien dans leurs missions « l’enseignement et le sou- tien pour l’acquisition des connaissances et l’accès à un niveau culturel optimal », il y a parfois des écarts entre les principes et la réalité…

En définitive, la question à se poser est la suivante : « Quelle est la meilleure solution, aujourd’hui, pour cet enfant ? » Et il faut se la reposer régulièrement. Le neuropsychologue de l’Institut peut en témoigner : « Nous recevons régulièrement des enfants qui se mettent à régresser ou à avoir des troubles du comportement, soit parce qu’ils sont trop stimulés, soit parce qu’ils sont au contraire sous-stimulés. Après réorientation ou changement d’école, tout rentre dans l’ordre ».

Les activités extrascolaires ?

Sport, scoutisme, activités artistiques (musique, danse, dessin, etc.)… Il faut avant tout que l’enfant, puis l’adolescent et l’adulte, soit heureux des loisirs qu’il pratique, d’autant qu’il est valorisant pour lui d’avoir, comme ses frères et sœurs, des activités. Au-delà, comme le rappelle souvent le Docteur Aimé Ravel, chef du service de la consultation, « la déficience intellectuelle n’affecte ni les capacités artistiques ni les aptitudes spirituelles. Il est donc important de ne pas se focaliser uniquement sur les « savoirs académiques » et d’aider son enfant à identifier ses talents et les développer. »

Quel que soit le mode de scolarisation, l’enfant a aussi besoin à la fois de se retrouver avec ses « pairs » et avec des enfants « ordinaires ». Le Docteur Clotilde Mircher, généticienne à l’Institut, le dit souvent : « Lorsqu’il est scolarisé en milieu spécialisé, une activité extrascolaire avec des enfants du même âge contribue à une intégration souvent bénéfique. A l’inverse, le sport adapté, par exemple, aide l’enfant intégré dans une école non spécialisée à se faire de vrais amis parmi des enfants « comme lui ». »

Attention néanmoins à ne pas surcharger l’emploi du temps des enfants, à « leur laisser des moments pour jouer, rêver, inventer, nécessaires à l’épanouissement de tout enfant ! » conseille le Docteur Aimé Ravel.

Le grand défi de la rentrée se trouve dans la relation que les parents doivent tisser avec l’équipe éducative, un lien fort tissé de confiance réciproque. Une alchimie toute particulière ! Pour nouer de bonnes relations, il est important de ne pas être trop intrusif par rapport à la pratique de l’enseignant, au risque d’altérer le dialogue. « Il n’y a rien de pire pour l’enfant qu’un blocage », confirme le neuropsychologue de l’Institut. A contrario, quand un dialogue serein et constructif se tisse, il est possible de transmettre des informations de base sur le syndrome : évoquer la fatigabilité plus grande de ces enfants, leur capacité de mémoire plus limitée… mais aussi le « mode d’emploi » de leur enfant en particulier : « partager des routines éducatives », explique le neuropsychologue de l’Institut, « des repères fixes ». « Il n’y a pas en effet un enfant qui ressemble à un autre, même s’ils sont porteurs de la même anomalie génétique ! » rappelle le Docteur Clotilde Mircher.

Ces repères vont sécuriser l’enfant… mais aussi les éducateurs ! Cette transmission est primordiale car l’enfant y apprend aussi que les limites à la maison sont les mêmes que les limites à l’école. Attention notamment aux enfants qui deviennent brusquement opposants, le handicap n’excuse pas tout ! Vers 4 ou 5 ans, l’enfant, en phase d’opposition forte, aura besoin, comme pour tout enfant, qu’on lui pose des limites claires et que ses parents refusent de répondre aux transgressions.

La rentrée, c’est l’inconnu. Il est important de bien la baliser. La première clé ? En parler avec l’enfant. Souvent. Ensuite, rien n’empêche d’être inventif ! Pour le neuropsychologue de l’Institut, « il y a des tas de petites choses qui vont aider à concrétiser le temps et les évènements qui se préparent : un calendrier où les journées de vacances sont repérées avec un soleil et les jours d’école avec un cartable ; le cartable, la trousse qu’on achète avec l’enfant ; les cycles de sommeil qu’on réadapte au fur et à mesure que la rentrée approche »… L’objectif est autant de préparer que de rassurer. Tout au long de l’été, il peut être important de continuer à stimuler l’enfant. le neuropsychologue de l’Institut propose, par exemple, « de lui fixer des objectifs d’autonomie à la maison, en adéquation avec son âge et avec ce qu’il a fait à l’école ». Par exemple, le défi à relever sera de mettre son T-shirt tout seul à la fin de l’été. Il s’agit à la fois de permettre à l’enfant de grandir en maturité mais aussi d’aider les parents à responsabiliser leur enfant.

Cela se passe mal… mon enfant ne fait plus des choses qu’il faisait auparavant… il semble triste… il ne veut plus aller à l’école ou au centre… que faire ?

Les causes peuvent être multiples, en lien avec l’école, le mode de scolarisation… ou non. N’hésitez pas à contacter votre médecin de l’Institut pour en discuter. Il pourra aussi vous proposer, si besoin, un rendez-vous avec un psychologue, un neuropsychologue ou un psychiatre.

Après les trois premières années, très protégées, passées dans le cadre familial, en crèche ou chez une nourrice, l’enfant a besoin, pour forger sa personnalité, de découvrir d’autres personnes, et surtout d’autres enfants. Il a également besoin de connaître une autorité autre que celle de ses proches, de se soumettre à une discipline collective dans laquelle chacun a sa place et doit être respecté.

Cet apprentissage de la vie qu’offre l’école est irremplaçable. Sa réussite dépend en grande partie du climat dans lequel vont se dérouler le choix de l’école, les échanges entre les parents de l’enfant, les enseignants et les parents des autres enfants et l’organisation du temps de l’enfant.

La perfection n’est pas de ce monde ! La meilleure école est, bien souvent, celle qui est la plus proche du domicile familial. On ne peut pas demander à un jeune enfant d’arriver à l’école dans de bonnes dispositions après un long trajet, surtout si celui-ci s’est déroulé dans le bruit et l’excitation.

Une classe à petit effectif devrait, théoriquement, permettre une plus grande disponibilité de la maîtresse et de l’ensemble du personnel. A cet âge-là, les enfants porteurs de trisomie 21 ont, en général, une capacité d’attention de courte durée et ont besoin d’être soutenus dans leurs efforts par la présence d’un adulte à leurs côtés… Cela n’est matériellement pas possible pour une maîtresse, même pleine de bonne volonté, si elle est face à une trentaine d’enfants de 3-4 ans débordants de vie et d’imagination !

Dans la mesure du possible, il faut éviter que l’enfant porteur de trisomie 21 se trouve dans le même groupe ou, même, dans la même maternelle que l’un de ses frères et sœurs (surtout s’il s’agit de jumeaux) afin que l’on ne soit pas tenté d’aller chercher ce dernier pour dénouer une situation délicate ou qu’on ne le laisse prendre de lui-même une responsabilité qui n’est pas la sienne vis-à-vis de son frère ou de sa sœur handicapée. Les frères et sœurs doivent pouvoir vivre leur vie pleinement, en toute indépendance. Seuls les parents sont responsables.

On ne peut pas imposer un enfant à une directrice de maternelle ou à une maîtresse. L’enfant risquerait de devenir, très vite, celui par qui arrivent tous les malheurs de la classe ou de l’école ! Il faut le faire désirer, convoiter, par l’ensemble du personnel de l’école et cela peut demander du temps…

Si l’école la plus proche du domicile des parents manifeste trop de réticences, mieux vaut prendre contact avec d’autres parents qui ont connu le même parcours du combattant dans la même région ou dans la même ville, afin d’avoir les « bonnes adresses », et avec le référent de la MDPH et les parents, de préparer un projet adapté aux possibilités de l’enfant et de sa famille.

Si l’enfant souffre d’une malformation cardiaque sévère ou d’une insuffisance respiratoire, il vaut mieux choisir une classe accessible sans escaliers trop fatigants à monter. Si l’enfant est malvoyant, attention aux escaliers dangereux à descendre et aux corridors qui n’en finissent pas.

Avant de prendre la décision, rien ne remplace plusieurs visites de l’école, un jour de classe, avec et sans l’enfant. La présence du père, au moins lors de l’une de ces visites, est très souhaitable parce qu’il aura un regard complémentaire de celui de sa conjointe mais surtout, parce que si Papa est là, c’est qu’il prend cela au sérieux et pour l’enfant, cela est très important.

Il faut se méfier de ce que l’on entend dire au sujet d’une école, d’une directrice, d’une maîtresse… Rien ne remplace le contact direct et le dialogue de personne à personne.

Les échanges réguliers entre les parents de l’enfant, les professionnels de l’école et les parents des autres enfants sont indispensables.

Il s’agit d’une alliance où chaque partie a des droits et des devoirs.

Rien ne petit être réglé en une fois. Il faut, de part et d’autre, prendre le temps de réfléchir à toutes les facettes du problème. Ceci est vrai, d’ailleurs, pour tous les enfants et le respect de cette ligne de conduite éviterait bien des conflits dont, finalement, l’enfant fait les frais.

Les parents doivent dire les choses aux professionnels directement, simplement, calmement, sans avoir peur. Il faut éviter, bien sûr, tout ce qui pourrait être considéré comme une leçon, une revendication ou du militantisme. Il ne faut pas, non plus, donner l’impression que l’on part battu d’avance ou que l’on demande une faveur extraordinaire. Cet enfant doit avoir, comme tous les enfants, l’école qui lui convient. C’est aussi simple que cela.

Les aspects positifs liés à la personnalité de l’enfant, à ses qualités, à ses désirs mais, également, à son environnement familial et à tout ce qui a déjà été entrepris pour l’aider… tout cela doit être évoqué par les parents en respectant les secrets de l’intimité familiale. Il en est de même pour les difficultés propres à l’enfant du fait de son caractère, de son comportement, des souffrances qu’il a vécues, de la situation familiale et, bien sûr, de son handicap. Ce bilan, avec ses plus et ses moins, sera régulièrement repris. A ce moment-là, il vaut mieux que l’enfant ne soit pas présent. Il risquerait d’être humilié ou, au contraire, de profiter de la situation !

Tous les professionnels de l’école, depuis la direction jusqu’au personnel de ménage, sont concernés par la présence de cet enfant dont le rythme d’évolution n’est pas le même que celui des autres. Tous doivent en être informés. Tous doivent pouvoir poser les questions qui les préoccupent. L’idéal est qu’ils puissent rencontrer d’autres professionnels qui ont vécu la même expérience. Les associations de parents et les professionnels de la santé ont également un rôle important dans ce domaine.

Si l’enfant a été à temps plein en crèche ou très souvent en halte-garderie, il est possible d’envisager, après une période d’essai, la fréquentation quotidienne de la maternelle. Dans le cas contraire, il faut aller progressivement d’un commun accord. L’enfant porteur de trisomie 21 de cet âge a peu de résistance : les ennuis rhinopharyngés sont fréquents ; l’école, même dans les meilleures conditions, peut le fatiguer en raison du rythme imposé, du bruit, des peurs, de la séparation avec le monde dans lequel il a toujours vécu… il faut lui donner le temps de s’adapter.

Les parents des autres enfants peuvent être inquiets ou, même, hostiles à l’idée de la présence d’un enfant handicapé à l’école. Il ne s’agit pas, bien sûr, d’imposer qui que ce soit mais, au contraire, de bâtir ensemble un projet respectant chacun : enfants, parents et professionnels ; il faut savoir prendre le temps pour y arriver. Ce n’est qu’à ce prix qu’un climat de confiance pourra être créé et que le travail de chacun pourra s’accomplir dans de bonnes conditions. Les parents se rendront alors compte de l’intérêt pour leur enfant d’avoir découvert que certains de leurs camarades ont plus de difficultés que d’autres mais que, finalement, on a tous besoin les uns des autres. Quand ils seront adultes, cette expérience leur permettra d’être plus à l’aise avec ceux qui ont des difficultés.

L’enfant porteur de trisomie 21 peut et doit avoir sa place à la maternelle.

Il est exceptionnel que les autres enfants le rejettent. Il risque, au contraire, de devenir très vite la « mascotte » de la maternelle, protégé par tous, ce qui n’est pas forcément très bon et qui peut l’agacer.

L’enfant porteur de trisomie 21, comme tous les enfants, ne se comporte pas de la même façon à l’école et à la maison. Les parents sont, le plus souvent, émerveillés de ce que leur enfant est capable de faire, seul, à l’école… On réserve le meilleur et le pire à ses parents, c’est bien connu ! Si l’enfant devient agressif, triste, s’il dort mal , il faut chercher, ensemble, la cause afin de pouvoir y remédier : ce peut être un emploi du temps trop chargé, un rythme trop rapide, le départ de la maîtresse préférée, la présence d’un camarade agité, accaparant ou jaloux… Quelques jours de vacances et de changement d’air sont, très souvent, le meilleur remède.

Comme pour un autre enfant, il faudra aller voir avec lui l’école, le CAMSP, l’IME, avant qu’il n’y aille régulièrement ; il faudra lui montrer sa place, la cour de récréation, les enfants qui y sont déjà ; il faudra lui dire le nom de la maîtresse, de l’éducateur mais cela ne sert à rien de lui en parler trop longtemps à l’avance car les personnes porteuses de trisomie 21 n’ont guère la notion du temps. Par contre, il est bon de faire le chemin plusieurs fois avec lui avant le grand jour.

Il reconnaîtra très vite les jours de la semaine grâce aux activités proposées à date fixe. Le plus difficile sera de lui faire admettre que, au jour d’aujourd’hui, on ne fait pas ceci ou cela, bien que ce soit le jour… Là, encore, cela ne sert à rien de le prévenir longtemps à l’avance ! Si les périodes de vacances doivent être préparées avec soin par les parents, l’enfant le « sentira » sans qu’on lui en parle par l’agitation ambiante, les valises, etc. Les premières nuits loin de la maison seront peut être agitées ; il est bon d’emporter un témoin de sa chambre, de son lit. L’enfant porteur de trisomie 21 a une grande mémoire des lieux et se retrouvera facilement d’une année sur l’autre mais il n’aime pas le changement et met du temps à s’adapter.

L’emploi du temps doit être aménagé de telle sorte que l’enfant puisse vivre sa vie d’enfant, jouer, s’amuser, rêver… se disputer avec ses frères et sœurs et ses copains comme tous les enfants du monde… faire ses expériences, manifester sa mauvaise humeur, ses préférences… choisir ses copains qui ne sont peut-être pas ceux que les parents auraient choisis… préférer une maîtresse à l’autre… Certains enfants me disent : « Tu sais, il y a la belle et l’autre ! »

L’école est fatigante ! Les rééducations ne doivent pas remplir le temps laissé par l’école. Les activités de loisir deviennent vite contraignantes si elles sont trop nombreuses et non désirées par l’enfant. La musique, la danse, le dessin, la piscine, le poney, l’ordinateur… Tout cela est bien mais où est le temps pour vivre ? Le respect du rythme de l’enfant et de sa personnalité permettra, dans la durée, de développer au mieux ses capacités.

Le départ à l’école est, dans toutes les familles, un moment particulièrement agité. L’excitation et l’instabilité risquent de se prolonger dans la matinée si, à la maison, le climat était à l’orage et si, pressé par le temps, tout a été fait dans la précipitation et les cris : toilette, passage aux WC, petit-déjeuner, etc. Beaucoup d’enfants arrivent à l’école surexcités et sans avoir déjeuné et se salissent ou, pire, se retiennent et ont mal au ventre toute la journée, parce que, tout simplement, on ne leur a pas donné assez de temps aux toilettes…

L’entrée à la maternelle suppose que l’enfant soit propre… mais tout est relatif. Il suffit, en fait, qu’il aille aux toilettes quand on lui propose, c’est-à-dire au moins une fois au milieu de la matinée et de l’après-midi (cela se fait dans toutes les maternelles) et qu’il soit habillé de telle sorte que l’opération ne soit pas trop compliquée. Une couche, un slip propre, peuvent très bien être, discrètement, placés dans le cartable.

Au retour de l’école, l’enfant porteur de trisomie 21 ne « raconte » pas spontanément ce qu’il s’est passé, ce qui désole beaucoup de parents et on les comprend. Il leur faudra deviner… Certaines poupées, si elles peuvent parler, en diraient long ! Les contacts réguliers et personnels avec la maîtresse sont indispensables tout au long de l’année et dès que le comportement de l’enfant change à la maison ou à l’école.